Les Têtes Brûlées : Man No Run


Au Cameroun, ils jouent dans un bar de Yaoundé, le Chacal Bar: ils font courir toute la ville. Ils sont traités de moricauds hurleurs, de footballeurs iconoclastes. En juin 1988, « les tetes brulées » commencent une tournée à travers la France, pour la première fois hors des frontières de leur pays. Nous, on les attend au pied de l’avion avec une caméra et un nagra. On va les suivre pendant plusieurs semaines. On essaie de se faire oublier, mais il nous guettent toujours du coin de l’oeil, le soir ils jouent sur des guitares électriques trafiquées de la musique de la forêt du Cameroun; le Bikutsi. Ils parlent Ewondo, Francais, Pidgin-English. Ils sont Béti, cela veut dire : Les Seigneurs de la forêt.

Critique

Ce film sur un groupe de musiciens camerounais disparus est une rareté. D’abord, en raison du son “singulier” de ces “têtes brûlées”, qui n’ont pas hésité à passer la musique Bikutsi à la moulinette hard et à faire entrer l’Afrique dans la modernité la plus décapante. Les vrais amateurs de rock ne s’y trompent pas et apprécient cette trace unique du travail des “Seigneurs de la forêt” qui n’ont pas laissé d’autre enregistrement. Ensuite, parce que Claire Denis, suivant la première tournée des musiciens en France, se pose en groupie, les laisse librement se livrer à l’autodérision, au second degré, et s’incline quand, caprice ou mal du pays, ils ne veulent pas entrer dans le jeu. La cinéaste tourne “sans filet”, improvise à leur gré, ce qui donne à la mise en scène le même caractère spontané, inventif que la musique. Toutes ces “aspérités” donnent à ce documentaire un ton d’authenticité : on gagne en vérité ce que l’on perd en fictionnement. Claire Denis sait trouver pour chacun de ses films une voie originale. Toute son œuvre le confirme.

Sources

http://www.film-documentaire.fr

https://www.unifrance.org

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